par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
DIVERTIR/DIVERTISSEMENT DEFINITION
Dictionnaire juridique
Définition de Divertir/Divertissement
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A l'origine, "Divertir" c'est détourner le cours de sa pensée ou de son action. Le divertissement est le résultat soit, d'une volonté propre du sujet diverti, soit celui d'un évènement extérieur, soit encore le résultat de l'intervention d'un tiers.
Le langage moderne a conservé le mot "divertissement" dans le sens de loisirs On trouve cette acception dans des arrêts de la Cour de cassation, par exemple pour caractériser le préjudice d'agrément "diminution des capacités de divertissement intellectuel du fait de la détérioration intellectuelle et rétrécissement du champ de la vie sociale consécutivement à l'aggravation des troubles caractériels" (2°chambre civile, i 28 mai 2009, pourvoi : 08-14084, et chambre sociale, 3 juin 2009, pourvoi : 08-40981 08-40982 08-40983 08-41712 08-41713 08-41714, tous deux sur le site de Legifrance). Dans un arrêt due la 1ère chambre civile, (20 mars 2007, pourvoi : 05-21541, Legifrance), il est même question de "joyeux divertissement".
Dans le langage du droit privé, "divertir" est synonyme de "recel" ou "détournement". C'est ainsi que dans l'ancien texte de l'article 1477 du Code civil on lisait : "Celui des époux qui aura diverti au recelé quelques effets de la communauté, est privé de sa portion dans lesdits effets". Sans doute pour des motifs de modernisation du vocabulaire juridique et parce que l'utilisation du verbe "divertir" ou du substantif "divertissement" peut prêter à confusion, dans le texte actuel du Code civil, "diverti" est devenu "détourné". Le mot n'apparaît plus dans le Code civil que dans l'article 976. Mais c'est probablement un oubli. "Divertissement" dans le sens de "détournement, " peut être lu dans les motifs des certains arrêts récents de la 1ère chambre civile 1 (20 février 2007, pourvoi : 04-18487 et 6 février 2007, pourvoi : 05-18622, Legifrance)
Le recel ou divertissement dont il est question est celui auquel se livre un héritier qui s'est emparé d'un bien faisant partie intégrante de l'héritage que se partagent plusieurs co-héritiers et dont il cache l'appartenance à la masse successorale, ou auquel s'est livré un époux en fraude des droits de son conjoint avec lequel il est marié sous un régime de communauté. Dans les deux cas, l'auteur est déchu de sa part dans la succession ou dans la masse des biens commun
Le recel n'implique pas nécessairement un acte d'appropriation, il peut résulter de tout procédé tendant à frustrer un des époux de sa part de communauté (1ère chambre civile, 9 janvier 2008, pourvoi : 05-15491 05-16313, Legifrance), mais il suppose un élément matériel consistant en tout procédé tendant à priver un époux de sa part de communauté et un élément intentionnel résidant dans la volonté délibérée de porter atteinte à l'égalité du partage. C'est à celle des parties qui se plaint du divertissement, d'établir la réalité des manoeuvres frauduleuses qu' aurait commises pour la spolier dans le partage, la personne contre laquelle son action est dirigée (1ère chambre civile, i 17 juin 2009, pourvoi : 08-17712. Legifrance). La Cour rappelle que pour apprécier s'il y a eu détournement, le Tribunal doit se reporter à la date de l'assignation en divorce comme date de dissolution de la communauté (1ère chambre civile, 6 février 2007, pourvoi : 05-18622, Legifrance)
L'époux receleur peut exercer sur le bien diverti son droit de prélèvement pour cause de reprise ou de récompense dès lors qu'il établit l'existence et le montant de sa créance. Dans cette mesure, qu'ayant constaté que la communauté était redevable envers le mari., celui-ci était fondé à conserver la somme que selon l'épouse, il aurait détourné (1ère chambre civile 1, 23 janvier 2007, pourvoi : 04-10526). Lorsque les biens recelés ne se retrouvent pas entre les mains de l'époux coupable du recel, la restitution en valeur s'effectue, en principe, par voie de rapport en moins prenant sur l'actif de l'indivision communautaire, et non par la condamnation de l'époux coupable au versement de la valeur des biens recelés au profit de son conjoint (1ère chambre civile, 12 novembre 1998, pourvoi : 96-21221, Legifrance).
Sur l'expression " en moins prenant" voir : Rapport successoral.
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