par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 3, 25 novembre 2009, 08-21384
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Cour de cassation, 3ème chambre civile
25 novembre 2009, 08-21.384

Cette décision est visée dans la définition :
Nom, Prénom




LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 septembre 2008), que la société Berthollet JLTS, locataire de locaux à usage commercial appartenant aux consorts X..., a cédé son fonds de commerce à la société Amm industrie qui a pris le nom de X... Amm industrie ; que les consorts X..., contestant la validité de cette cession, ont sommé la société Berthollet JLTS, par actes notifiés le 14 mai 2004 au visa de la clause résolutoire du bail, et dénoncé le 7 juin 2004 à la société Berthollet Amm industrie, d'occuper les locaux loués et de payer une somme au titre du remboursement des taxes foncières échues de 1996 au 31 décembre 2006 ; que les sociétés X... JLTS et X... Amm industrie ont assigné les bailleurs aux fins de voir dire valide la cession du fonds de commerce et nul le commandement de payer ;

Sur le premier moyen :

Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande tendant à voir constater l'acquisition de la clause résolutoire du bail en suite des commandements délivrés, alors, selon le moyen :

1°/ que le commandement signifié pour une somme supérieure à celle effectivement due demeure valable à hauteur de cette dernière ; qu'en refusant de constater l'acquisition de la clause résolutoire au regard du commandement des 14 mai et 7 juin 2006 visant les taxes foncières, impayées depuis 1996, après avoir constaté que l'expert avait conclu à une
imposition foncière récupérable de 33 562,45 euros pour la période du 4 août 1999 au 31 décembre 2006, ce dont il résultait que les consorts X... étaient titulaires d'une créance certaine au titre de l'article 4.3° du bail, dont ils justifiaient le principe devant la cour d'appel et dont le non paiement dans le mois du commandement avait entraîné l'acquisition de la clause résolutoire, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 1134 du code civil, L. 145 41 du code de commerce, ensemble l'article 561 du code de commerce ;

2°/ qu'en statuant comme elle l'a fait, après avoir expressément relevé que l'expert avait conclu, d'une part à une imposition foncière récupérable de 33 562,45 euros pour la période du 4 août 1999 au 31 décembre 2006, d'autre part au caractère erroné de la répartition des impositions effectuées par l'indivision X... en raison d'une "confusion entre l'assiette du bail (à l'origine des parcelles de terrain) et l'assiette des impositions (bâtiments construits)", de sorte que les consorts X... avaient, de bonne foi, délivré à leur locataire un commandement de payer les taxes foncières dues depuis 1996, en application de l'article 4 3° du bail sans avoir connaissance de l'erreur affectant le montant demandé, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 1134 du code civil et L. 145 41 du code de commerce ;

3°/ qu'en statuant comme elle l'a fait, bien que l'arrêt du 25 avril 2003 avait statué dans une instance tendant à la fixation de loyer du bail renouvelé et non en acquisition de la clause résolutoire pour défaut de paiement des taxes foncières, de sorte que les consorts X... avaient, de bonne foi, délivré à leur locataire un commandement de payer les taxes foncières dues depuis 1996, en application de l'article 4 3° du bail sans avoir connaissance de l'erreur affectant le montant demandé, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 145 41 du code de commerce ;

Mais attendu qu'ayant souverainement retenu que le commandement de payer avait été délivré de mauvaise foi, la cour d'appel, qui ne s'est ni fondée sur une erreur affectant les sommes réclamées par ce commandement, ni référée à l'objet du litige tranché par l'arrêt de la cour d'appel du 25 avril 2003, a légalement justifié sa décision ;


Sur le deuxième moyen :

Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt de condamner la société Berthollet Amm industrie à payer une somme au titre des taxes foncières récupérables sur la seule période du 4 août 1999 au 31 décembre 2006, alors, selon le moyen :

1°/ qu'un commandement de payer signifié à celui qu'on veut empêcher de prescrire, interrompt la prescription ; qu'en déclarant prescrites les sommes réclamées au titre des taxes foncières antérieures au 4 août 1999, après avoir expressément relevé que les consorts X... aient fait délivrer à leur locataire un commandement de payer le 17 avril 2001 pour la période de 1996 à avril 2001, ce dont il résultait nécessairement que la prescription quinquennale avait été interrompue, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 2244 du code civil ;

2°/ que la prescription quinquennale ne s'applique aux créances à terme périodique que si elles sont déterminées ; que tel n'est pas le cas lorsque la créance dépend d'éléments qui ne sont pas connus du créancier ; qu'en l'espèce, le montant de la taxe foncière dépendait chaque année d'éléments extérieurs aux consorts X... ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 2277 du code civil ;

3°/ que la prescription quinquennale ne s'applique aux créances à terme périodique que si elles sont déterminées ; que tel n'est pas le cas lorsque la créance fait l'objet d'un litige ; qu'en l'espèce, le montant des taxes foncières depuis 1996 faisait l'objet d'un litige entre les consorts X... et leur locataire ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a derechef viole l'article 2277 du code civil ;

Mais attendu, d'une part, que les consorts X... n'ayant pas soutenu devant la cour d'appel que le commandement de payer délivré le 17 avril 2001 avait interrompu la prescription, ni que la créance de taxe foncière échappait à la prescription quinquennale comme faisant l'objet d'un litige, le moyen est nouveau, mélangé de fait et de droit ;

Attendu, d'autre part, que la créance litigieuse, née de l'obligation contractuelle du preneur de rembourser aux bailleurs le montant de la taxe foncière afférente aux locaux loués, étant déterminée annuellement et constituant un accessoire du loyer, la cour d'appel en a exactement déduit qu'elle se trouvait soumise à la prescription quinquennale ;

D'où il suit que le moyen, pour partie irrecevable, n'est pas fondé pour le surplus ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt de dire valide la cession, avec le nom patronymique, de la société Berthollet JLTS à la société Berthollet Amm industrie, alors, selon le moyen :

1°/ que le nom patronymique d'une famille donne à ses membres le droit de s'opposer à toute appropriation indue ; qu'en statuant comme elle l'a fait, bien que la société Berthollet JLTS ait cédé, sans l'accord des consorts X..., non pas sa dénomination sociale, mais le seul nom patronymique de ces derniers, lequel a été accolé à la dénomination Amm industrie, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;

2°/ que le titulaire d'un nom patronymique peut en interdire l'usage par un tiers s'il justifie d'un préjudice ; qu'en l'espèce, les consorts X... faisaient valoir, dans leurs conclusions d'appel, que l'utilisation par la société Amm industrie de leur nom patronymique leur portait préjudice, en ce que la famille X..., qui vivait à Montreuil depuis plusieurs générations et avait exploité les lieux jusqu'en 1995 en respectant la réglementation liée à la santé et à la sécurité, subissait un préjudice du fait du non respect flagrant de cette réglementation par la société Berthollet Amm industrie ; qu'en omettant de rechercher si les consorts X... ne subissaient pas un préjudice du fait de l'utilisation, par la société Amm industrie, de leur nom patronymique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant constaté que la société Berthollet JLTS avait été autorisée, par un acte de M. Charles X..., à utiliser le nom patronymique X..., et qu'en conséquence ce nom était devenu un élément du fonds de commerce, la cour d'appel, qui a retenu à bon droit que la société Berthollet JLTS l'avait valablement cédé à la société à la société Amm industrie et n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les consorts X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les consorts X... à payer à la société Berthollet Amm industrie la somme de 2 500 euros ; rejette la demande des consorts X... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt.

Moyens produits par la SCP Defrenois et Levis, avocat aux Conseils, pour les consorts X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté les consorts X... de leur demande tendant à voir constater l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail commercial, en suite des sommations et commandements signifiés et dénoncés en mai et juin 2004 ;

AUX MOTIFS QU'en concluant son rapport sur une imposition foncière récupérable de 33.562,45 pour la période du 4 août 1999 au 31 décembre 2006, l'expert précise : « la répartition des impositions effectuées par l'indivision X... entre les biens dont elle s'est réservée la jouissance et les biens donnés à bail était erronée au motif que les bailleurs ont opéré une confusion entre l'assiette du bail (à l'origine des parcelles de terrain) et l'assiette des impositions (bâtiments construits). Les impositions étant établies en fonction de la nature et de l'affectation des locaux, la ventilation des impositions foncières ne peut être réalisée qu'au regard de cette affectation retenue par l'administration fiscale, indépendamment de l'emprise au sol des constructions, emprise ne donnant lieu à aucune imposition » ; que les consorts X..., qui avaient plusieurs fois modifié les surfaces et les locaux loués, ainsi que le révèlent les différents avenants au bail d'origine, ont délivré des commandements de payer sur des créances éventuelles et dont ils n'ont pu justifier ne serait ce que du principe devant le tribunal ; que les consorts X... avaient déjà, le 17 avril 2001, délivré commandement visant la clause résolutoire d'avoir à payer les mêmes taxes foncières concernant les années 1996 jusqu'au 17 avril 2001 ; qu'ils ont été déboutés de leur demande par un précédent arrêt de la cour d'appel de Paris du 25 avril 2003 ; que pour ces motifs les commandements de payer précités seront déclarés nuls comme ayant été délivrés de mauvaise foi ;

1/ ALORS QUE le commandement signifié pour une somme supérieure à celle effectivement due demeure valable à hauteur de cette dernière ; qu'en refusant de constater l'acquisition de la clause résolutoire au regard du commandement des 14 mai et 7 juin 2006 visant les taxes foncières, impayées depuis 1996, après avoir constaté que l'expert avait conclu à une imposition foncière récupérable de 33.562,45 pour la période du 4 août 1999 au 31 décembre 2006, ce dont il résultait que les consorts X... étaient titulaires d'une créance certaine au titre de l'article 4.3° du bail, dont ils justifiaient le principe devant la cour d'appel et dont le non-paiement dans le mois du commandement avait entraîné l'acquisition de la clause résolutoire, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 1134 du code civil, L. 145-41 du code de commerce, ensemble l'article 561 du code de commerce ;

2/ ALORS QU'en statuant comme elle l'a fait, après avoir expressément relevé que l'expert avait conclu, d'une part à une imposition foncière récupérable de 33.562,45 pour la période du 4 août 1999 au 31 décembre 2006, d'autre part au caractère erroné de la répartition des impositions effectuées par l'indivision X... en raison d'une « confusion entre l'assiette du bail (à l'origine des parcelles de terrain) et l'assiette des impositions (bâtiments construits) », de sorte que les consorts X... avaient, de bonne foi, délivré à leur locataire un commandement de payer les taxes foncières dues depuis 1996, en application de l'article 4-3° du bail sans avoir connaissance de l'erreur affectant le montant demandé, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 1134 du code civil et L. 145-41 du code de commerce ;

3/ ALORS QU'en statuant comme elle l'a fait, bien que l'arrêt du 25 avril 2003 avait statué dans une instance tendant à la fixation de loyer du bail renouvelé et non en acquisition de la clause résolutoire pour défaut de paiement des taxes foncières, de sorte que les consorts X... avaient, de bonne foi, délivré à leur locataire un commandement de payer les taxes foncières dues depuis 1996, en application de l'article 4-3° du bail sans avoir connaissance de l'erreur affectant le montant demandé, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 145-41 du code de commerce.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité la condamnation de la société Berthollet AMM Industrie et de M. Y..., ès qualités, à payer aux consorts X... la somme de 33.562,45 correspondant au montant des impositions et fonciers récupérables dus sur la période du 4 août 1999 au 31 décembre 2006 ;

AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE les sommes réclamées au titre de l'indivision X... au titre des loyers et accessoires concernent en réalité uniquement le remboursement des impôts fonciers prévu au bail ; qu'il convient d'observer que l'assignation datant du 4 août 2004, toutes les sommes réclamées pour la période antérieure au 4 août 1999 sont prescrites ;


ET AUX MOTIFS PROPRES QUE l'expert conclut son rapport sur une imposition foncière récupérable de 33.562,45 pour la période du 4 août 1999 au 31 décembre 2006 (…) ; que les consorts X... avaient déjà, le 17 avril 2001, délivré commandement visant la clause résolutoire d'avoir à payer les mêmes taxes foncières concernant les années 1996 jusqu'au 17 avril 2001 (…) ; que la condamnation qui sera prononcée sur la somme retenue par expert sera donc exécutée en deniers ou en quittances valables, étant observé que doit être confirmée la prescription retenue par les premiers juges ;

1/ ALORS QU' un commandement de payer signifié à celui qu'on veut empêcher de prescrire, interrompt la prescription ; qu'en déclarant prescrites les sommes réclamées au titre des taxes foncières antérieures au 4 août 1999, après avoir expressément relevé que les consorts X... avaient fait délivrer à leur locataire un commandement de payer le 17 avril 2001 pour la période de 1996 à avril 2001, ce dont il résultait nécessairement que la prescription quinquennale avait été interrompu, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 2244 du code civil ;

2/ ALORS QUE la prescription quinquennale ne s'applique aux créances à terme périodique que si elles sont déterminées ; que tel n'est pas le cas lorsque la créance dépend d'éléments qui ne sont pas connus du créancier ;
qu'en l'espèce, le montant de la taxe foncière dépendait chaque année d'éléments extérieurs aux consorts X... ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 2277 du code civil ;

3/ ALORS QUE la prescription quinquennale ne s'applique aux créances à terme périodique que si elles sont déterminées ; que tel n'est pas le cas lorsque la créance fait l'objet d'un litige ; qu'en l'espèce, le montant des taxes foncières depuis 1996 faisait l'objet d'un litige entre les consorts X... et leur locataire ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a derechef viole l'article 2277 du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit valide et opposable aux consorts X... la cession de la société Berthollet JLTS à la société Berthollet AMM Industrie, et d'avoir en conséquence débouté les consorts X... de leur demande tendant à voir dire nulle et de nul effet, et subsidiairement inopposable à leur égard, la cession de leur nom patronymique intervenue par acte du 1er octobre 2003 sans leur accord ni information préalable ;

AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE parmi les éléments incorporels achetés dans le cadre du plan de cession figure le nom commercial et l'indivision n'est pas fondée à venir faire grief au nouvel acquéreur du fonds d'avoir conservé l'usage de ce nom commercial ;

ET AUX MOTIFS PROPRES QUE le nom X... faisait partie des éléments incorporels de la société X... lorsque celle-ci a été cédée après autorisation du tribunal de commerce et en vertu d'un acte signé par M. Charles X... lui-même à la société Berthollet JLTS ; que ce nom n'est pas utilisé isolément mais associé à des initiales ;

1/ ALORS QUE le nom patronymique d'une famille donne à ses membres le droit de s'opposer à toute appropriation indue ; qu'en statuant comme elle l'a fait, bien que la société Berthollet JLTS ait cédé, sans l'accord des consorts X..., non pas sa dénomination sociale, mais le seul nom patronymique de ces derniers, lequel a été accolé à la dénomination AMM Industrie, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;

2/ ALORS QUE le titulaire d'un nom patronymique peut en interdire l'usage par un tiers s'il justifie d'un préjudice ; qu'en l'espèce, les consorts X... faisaient valoir, dans leurs conclusions d'appel, que l'utilisation par la société AMM Industrie de leur nom patronymique leur portait préjudice, en ce que la famille X..., qui vivait à Montreuil depuis plusieurs générations et avait exploité les lieux jusqu'en 1995 en respectant la réglementation liée à la santé et à la sécurité, subissait un préjudice du fait du non-respect flagrant de cette réglementation par la société Berthollet AMM Industrie ; qu'en omettant de rechercher si les consorts X... ne subissaient pas un préjudice du fait de l'utilisation, par la société AMM Industrie, de leur nom patronymique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil.



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Cette décision est visée dans la définition :
Nom, Prénom


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.