par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. plen., 29 mai 2009, 08-11422
Dictionnaire Juridique

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Cour de cassation, assemblée plénière
29 mai 2009, 08-11.422

Cette décision est visée dans les définitions suivantes :
Équité
Transaction




LA COUR DE CASSATION, siégeant en ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE, a rendu l'arrêt suivant :

Arrêt n° 578 P+B+R+I
Pourvoi n° F 08-11.422

Statuant sur le pourvoi formé par le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages, dont le siège est 64 rue Defrance, 94682 Vincennes,

contre l'arrêt rendu le 29 novembre 2007 par la cour d'appel de Lyon (1re chambre civile A), dans le litige l'opposant à M. Richard X..., domicilié ...,

défendeur à la cassation ;

Le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages s'est pourvu en cassation contre l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble en date du 17 décembre 2002 ;

Cet arrêt a été cassé le 14 juin 2006 par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation ;

La cause et les parties ont été renvoyées devant la cour d'appel de Lyon qui, saisie de la même affaire, a statué par arrêt du 29 novembre 2007 dans le même sens que la cour d'appel de Grenoble par des motifs qui sont en opposition avec la doctrine de l'arrêt de cassation ;

Un pourvoi ayant été formé contre l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, M. le premier président a, par ordonnance du 18 décembre 2008, renvoyé la cause et les parties devant l'assemblée plénière ;

Le demandeur invoque, devant l'assemblée plénière, le moyen de cassation annexé au présent arrêt ;

Ce moyen unique a été formulé dans un mémoire déposé au greffe de la Cour de cassation par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat du Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages ;

Le rapport écrit de Mme Kamara, conseiller, et l'avis écrit de M. de Gouttes, premier avocat général, ont été mis à la disposition du Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages ;

Sur quoi, LA COUR, siégeant en assemblée plénière, en l'audience publique du 15 mai 2009, où étaient présent : M. Lamanda, premier président, MM. Bargue, Gillet, Pelletier, Lacabarats, présidents, Mme Mazars, conseiller doyen en remplacement de Mme Collomp, président empêché, Mme Lardennois, conseiller doyen en remplacement de Mme Favre, président empêché, Mme Kamara, conseiller rapporteur, MM. Joly, Peyrat, Mme Tric, M. Pluyette, Mme Pinot, MM. Bizot, Chauviré, Terrier, Ludet, Grellier, Bloch, conseillers, M. de Gouttes, premier avocat général, Mme Tardi, directeur de greffe ;

Sur le rapport de Mme Kamara, conseiller, assistée de Mme Gregori, greffier en chef au Service de documentation et d'études, les observations de la SCP Delaporte, Briard et Trichet, l'avis de M. de Gouttes, premier avocat général, auquel la SCP Delaporte, Briard et Trichet invitée à le faire, n'a pas souhaité répliquer, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué rendu sur renvoi après cassation (Civ. II, 14 juin 2006, B. n° 159), que le véhicule conduit par M. X..., qui n'était pas assuré, est entré en collision avec celui de M. Y... ; que le Fonds de garantie automobile, devenu le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (le fonds), a réglé une certaine somme à l'assureur de la victime en réparation du préjudice matériel ; que le fonds a assigné M. X... en paiement de la somme versée ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu que le fonds fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes, alors, selon le moyen, que, dans ses lettres recommandées avec demande d'avis de réception des 19 juin et 15 juillet 1996, il avait fait savoir à M. X... que la somme en cause était réclamée "conformément aux articles L. 421-3 et R. 421-16 du code des assurances", ce dont il résultait que M. X... avait reçu l'information suffisante pour connaître l'existence d'une transaction et exercer son droit de contestation ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 421-3 et R. 421-16 du code des assurances, ensemble l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu que constitue un droit fondamental, en vue d'un procès équitable, le droit d'être pleinement informé de la faculté de contester devant un juge une transaction opposée à celui qui n'y était pas partie ;

Et attendu que l'arrêt retient que les lettres recommandées adressées à M. X..., qui se bornaient à indiquer que le remboursement des sommes versées par le fonds était demandé conformément aux articles L. 421-3 et R. 421-16 du code des assurances et ne se référaient pas expressément à l'existence d'une transaction, n'informaient nullement leur destinataire du droit dont il disposait de contester devant le juge le montant des sommes qui lui étaient réclamées, du délai pendant lequel ce droit à contestation était ouvert et de son point de départ ;

Que de ces énonciations, la cour d'appel a déduit, à bon droit, que le fonds ne pouvait prétendre opposer une quelconque transaction à M. X... ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Vu l'article L. 421-3, alinéa 1er, du code des assurances ;

Attendu que, selon ce texte, le fonds de garantie est subrogé dans les droits que possède le créancier de l'indemnité contre l'auteur de l'accident ou son assureur ;

Attendu que, pour débouter le fonds de ses demandes, l'arrêt se borne à retenir l'absence d'une transaction opposable à M. X... ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, même en l'absence d'une transaction opposable, il lui appartenait de se prononcer sur l'action récursoire dont elle était saisie par le fonds subrogé dans les droits du créancier d'indemnité, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 novembre 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, siégeant en assemblée plénière, et prononcé par le premier président en son audience publique du vingt-neuf mai deux mille neuf.



MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils pour le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté le Fonds de garantie de sa demande tendant à voir condamner M. Richard X... à lui rembourser la somme de 8.826,57 euros, outre intérêts légaux ;

Aux motifs que "l'article L. 421-3 du Code des Assurances énonce que lorsque le Fonds de Garantie transige avec la victime, cette transaction est opposable à l'auteur des dommages, sauf le droit pour celui-ci de contester devant le juge le montant des sommes qui lui sont réclamées du fait de cette transaction. L'article R. 421-16 dispose, d'une part, que lorsque l'auteur des dommages entend user du droit de contestation prévu par l'article L. 421-3, il doit porter son action devant le tribunal compétent dans un délai de trois mois à compter de la mise en demeure de remboursement adressée par le fonds de garantie, et d'autre part, que la mise en demeure prévue à l'alinéa précédent résulte de l'envoi par le fonds d'une lettre recommandée avec accusé de réception ; qu'or les lettres recommandées des 19 juin 1996 et 19 juillet 1996, qui informent M. X..., la première de ce que le Fonds de Garantie a versé une provision de 56.600 francs à M. Y... et la seconde du versement d'une provision supplémentaire de 1.298,51 francs, se bornent à indiquer que le remboursement est demandé conformément aux articles L. 421-3 et R. 421-16 du Code des Assurances, et que cette somme est augmentée des intérêts au taux légal jusqu'à paiement intégral de la dette. Ces mises en demeure qui ne se réfèrent pas expressément à l'existence d'une "transaction", n'informent nullement leur destinataire du droit dont il dispose de contester devant le juge le montant des sommes qui lui sont réclamées, du délai pendant lequel ce droit à contestation est ouvert et de son point de départ ; qu'or constitue un droit fondamental celui d'être pleinement informé de la faculté de contester une décision ou une transaction que l'on vous oppose, et ce d'autant plus qu'en l'espèce, par hypothèse, celui à qui cette transaction est opposée, n'y était pas partie, et de la possibilité de porter ainsi, comme la loi le prévoit, cette contestation devant un juge en vue d'un procès équitable. La notification d'un jugement qui se bornerait à viser l'article 538 du Nouveau Code de procédure civile, sans indiquer la faculté d'exercer un appel, le délai pendant lequel cet appel est ouvert et son point de départ, ne pourrait être tenue pour valable. En l'espèce, les termes comminatoires employés par les mises en demeure et la menace de poursuites judiciaires ne laissaient présager, en dépit du simple visa des articles L. 421-3 et R. 421-16 du Code des Assurances, aucune faculté de contestation et n'informaient nullement leur destinataire du délai pour contester et de son point de départ ; qu'en l'état, le Fonds de Garantie ne peut prétendre opposer une quelconque transaction à M. X..., dès lors que celui-ci n'a pas été mis en mesure de contester le montant de cette transaction, comme l'article L. 421-3 du Code des Assurances lui en réservait la faculté ; qu'il convient en conséquence, par substitution de motifs, de confirmer le jugement du Tribunal de Grande Instance de VIENNE qui a débouté le Fonds de Garantie des Assurances Obligatoires de Dommages de toutes ses demandes" (arrêt attaqué, p. 3) ;

Alors que dans ses lettres recommandées avec demandes d'avis de réception des 19 juin et 15 juillet 1996, le Fonds de garantie avait fait savoir à M. X... que les sommes en cause étaient réclamées "conformément aux articles L. 421-3 et R. 421-16 du Code des assurances", ce dont il résultait que M. X... avait reçu l'information suffisante pour connaître l'existence d'une transaction et exercer son droit de contestation ; qu'ainsi en décidant le contraire la cour d'appel a violé les articles L. 421-3 et R. 421-16 du Code des assurances, ensemble l'article 1134 du Code civil ;

Alors, en outre et subsidiairement, qu'en toute hypothèse, le Fonds de garantie est subrogé dans les droits que possède le créancier de l'indemnité contre la personne responsable de l'accident ou son assureur ; qu'il peut donc solliciter, en sa qualité de subrogé dans les droits de la victime, que l'auteur du dommage soit déclaré tenu à indemnisation sur le fondement de la loi du 5 juillet 1985 et il appartient alors au juge de fixer contradictoirement le montant de cette indemnisation ; qu'ainsi, en déboutant purement et simplement le Fonds de Garantie de son action récursoire engagée contre M. X..., après avoir pourtant expressément constaté que ce dernier avait perdu le contrôle de son véhicule et s'était déporté sur la voie de gauche pour percuter le véhicule conduit M. Y..., la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 421-3, alinéa 1er, du Code des assurances, ensemble les articles 1er, 3 et 6 de la loi du 5 juillet 1985".



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Cette décision est visée dans les définitions suivantes :
Équité
Transaction


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 11/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.