par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



INTERPRETATION DEFINITION
Dictionnaire juridique

Définition de Interprétation

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Lorsqu'elle porte sur une convention à propos de l'exécution de laquelle les parties sont en conflit, l'interprétation en est confiée à un Tribunal, ou, à un arbitre. Pour dégager quel est le sens de la disposition du contrat qui constitue l'objet du différend, le juge cherche quelle a été leur commune intention. L'interprétation des termes d'une convention appartient souverainement aux juges du fond : en revanche la qualification des conventions, c'est à dire, la définition des effets de droit qu'elles produisent, est une question susceptible de faire l'objet d'un pourvoi en cassation. A l'occasion d'un litige sur les modalités de l'exécution d'un contrat, dans une situation juridique donnée, l'interprétation peut éventuellement porter sur le sens à donner au texte d'une Loi. Et, à défaut de manifestation claire, et pour interpréter le sens d' une clause ambiguë d'un acte authentique de vente, le juge peut se référer au compromis de vente sous seing privé pour connaître la commune intention des parties. (C. A. Limoges (ch. civ., 2e sect.), 22 juin 2005 - BICC n°671 du 15 novembre 2007). Selon le Code de la consommation, les contrats s'interprètent dans le sens le plus favorable au consommateur ou au non-professionnel

Une loi n'est interprétative qu'autant qu'elle se borne à reconnaître, sans rien innover, un droit préexistant qu'une définition imparfaite avait rendu susceptible de controverse. Lorsque une loi introduit dans la législation une disposition nouvelle elle n'a pas de caractère interprétatif et n'est donc, elle n'est pas applicable à des faits antérieurs à son entrée en vigueur (chambre sociale 8 juin 2011 pourvoi n°09-67051, BICC n°750 du 1er novembre 2011 et Legifrance)

Lorsqu'il porte sur une décision de justice, le mot "interprétation", désigne la procédure par laquelle, à la demande d'une partie qui en évoque l'imprécision, le juge explicite les dispositions contenues dans son jugement. Afin d'éviter que, sous couvert d'obscurité, la partie qui a saisi le juge ne tente, par ce moyen, de faire modifier une décision qui lui fait grief et faire ainsi échec à l'autorité de la chose jugé, l'interprétation est soumise à des règles strictes. Elle a lieu au contradictoire de toutes les parties qui doivent être appelée à l' instance en interprétation. Les juges saisis d'une contestation relative à l'interprétation d'une précédente décision ne peuvent, sous prétexte d'en déterminer le sens, apporter une modification quelconque aux dispositions précises de celle-ci, fussent-elles erronées. (1ère Civ. - 28 mai 2008, BICC n°689 du 15 octobre 2008).

Sur le pouvoir d'interprétation par le juge du fond, de deux contrats d'assurance présentant deux clauses divergentes, rend nécessaire leur interprétation, exclusive de dénaturation, et en renvoyant aux dispositions du Code de la consommation, la deuxième Chambre civile a estimé que le juge du fond a fait une exacte application des dispositions de l'article L. 133-2 de ce code en décidant que l'assuré devait bénéficier de la stipulation la plus favorable qui était celle prévue par le second contrat. (2e Chambre civile 3 juillet 2014, pourvoi n°13-22418, BICC n°812 du 1er décembre 2014 et Legifrance).

Lorsqu'à l'occasion d'un litige le juge interprète une Loi étrangère, sa décision est souveraine, ce qui signifie que sur ce point la décision est insusceptible d'être portée devant le Cour de cassation. (1ère chambre civile 14 novembre 2006, pourvoi n°05-12201, Legifrance). Consulter aussi : 1ère Chambre civile 16 novembre 2004, pourvoi : 01-10702, Bulletin 2004, I, n° 268, p. 224 et précédemment la même formation avait rendu un arrêt dans le même sens le 3 juin 2003, (pourvoi n°01-00859, Bulletin, I, n° 133, p. 105, Legifrance). On peut y lire : "s'il incombe au juge français, qui applique une loi étrangère, de rechercher et de justifier la solution donnée à la question litigieuse par le droit positif de l'Etat concerné, l'application qu'il fait de ce droit étranger, quelle qu'en soit la source, légale ou jurisprudentielle, échappe, sauf dénaturation, au contrôle de la Cour de Cassation".

Quant aux effets de l'interprétation, il est jugé que le dispositif de l'arrêt interprétatif se substituant à celui de la décision entreprise, il prend rétroactivement la place de celle-ci, laquelle est mise à néant des chefs infirmés. Dès lors, la contribution résultant de l'arrêt interprétatif est due à compter de la décision de première instance. (1ère Civ. - 2 avril 2008, BICC n°686 du 15 juillet 2008).

Sur l'interprétation des arrêts de la Cour de Cassation statuant en matière civile, il convient de consulter la fiche méthodologique : "Interprétation et portée des arrêts de la Cour de cassation en matière civile", elle est consultable au BICC n°661-2 du 15 mai 2007, ainsi que l'article de M. Jacques Voulet paru au JPC 1970, doctrine, n° 2305, la note de Madame Joëlle Fossereau parue au BICC du 1er octobre 1987, et l'article de M. André Perdriau et de M° Jacques Ghestin publié au Dalloz 2004, Chroniques, p. 2239.

Les sentences arbitrales peuvent également être interprétées lorsque les parties les estiment obscures. L'interprétation des sentences arbitrales reste de la compétence des arbitres qui les ont rendues.

Textes

  • Code de procédure civile, article 461 (jugements).
  • Code civil, articles 1156 et s. (contrats et conventions)
  • Bibliographie

  • Ancel (S.), L'interprétation des contrats en droit civil et en droit public, Paris, édité par l'auteur, 1997.
  • Buisson (J.), Observations sous Crim., 20 novembre 2007, Bull. crim. 2007, n°286, Procédures, février 2008, n°2, p. 28. (Interprétation ou rectification - Pouvoirs des juges - Limites).
  • Costedoat Maleville (M-H.), L'interprétation des contrats, thèse Rouen, 1990.
  • Ferreri (S.), Le juge national et l'interprétation des contrats internationaux, Revue internationale de droit comparé, 2001, n°1, p. 29, Tome 403.
  • Flora (G.), L'interprétation et la rédaction du pacte (de préférence), Droit & Patrimoine - 2006, n° 144.
  • Gelot (B.), Finalités et méthodes objectives d'interprétation des actes juridiques. - L. G. D. J. / Thèses / Bibliothèque de droit privé,2003.
  • Geny (F.), Méthode d'interprétation et sources en droit privé positif : essai critique, LGDJ, Paris, 1919.
  • Ghestin (J.), L'interprétation d'un arrêt de la Cour de cassation, Dalloz, 9 septembre 2004, n° 31, Chroniques, p. 2239-2248.
  • Hebraud, L'appel des jugements interprétatifs, JCP., 1937, I, 43.
  • Lindon, Perfection et imperfections de la décision judiciaire, Dalloz 1973, Chr. 143.
  • Malaurie (Ph.), L'interprétation évolutive d'un testament selon la Convention européenne des droits de l'homme. Observations sous CEDH (4e section), 13 juillet 2004, requête n°69498/01, X... et al. c/ Andorre. Répertoire du notariat Defrénois, 15 décembre 2005, n° 23, jurisprudence, article 38285, p. 1909-1911.
  • Ouelhazy (R.), Le juge judiciaire et la force obligatoire du contrat, thèse Strasbourg III, 1997.
  • Villey (M.), Modes classiques d'interprétation du droit, Paris, Sirey, 1972.
  • Weber (J. -F.), Comprendre un arrêt de la Cour de cassation rendu en matière civile, Fiche méthodologique en matière civile, BICC n°702 du 15 mai 2009.

  • Liste de toutes les définitions